Face aux enjeux environnementaux et à la nécessité de réduire l’utilisation des intrants chimiques dans l’agriculture, des solutions naturelles émergent pour améliorer la fertilité des sols. Parmi ces solutions, la Litière Forestière Fermentée (LiFoFer) se distingue comme un biofertilisant prometteur. Ce procédé, inspiré de techniques anciennes utilisées notamment en Amérique du Sud et en Asie, est de plus en plus adopté en Europe. La LiFoFer offre une alternative durable pour renforcer la santé des sols, stimuler la croissance des cultures et limiter les maladies sans recourir aux produits chimiques. Dans cet article, nous allons explorer ce qu’est la LiFoFer, comment elle est fabriquée, et pourquoi elle se présente sous deux formes distinctes, une phase solide et une phase liquide.
Qu’est-ce que la LiFoFer ?
La Litière Forestière Fermentée (LiFoFer) est un biofertilisant composé d’une multitude de micro-organismes (bactéries, levures, champignons) provenant de la litière forestière. Ces micro-organismes, naturellement présents dans la litière, jouent un rôle clé dans la décomposition de la matière organique. En les utilisant dans des sols agricoles, la LiFoFer améliore la fertilité, la structure du sol, et permet une meilleure disponibilité des nutriments pour les plantes.
Cette technique repose sur la fermentation anaérobie (sans oxygène) de la litière forestière mélangée à des sous-produits agricoles comme du son de blé, de la mélasse et du petit lait. Une fois fermentée, cette litière devient un biofertilisant riche en micro-organismes bénéfiques, utilisable pour stimuler la croissance des cultures et lutter contre les agents pathogènes.
Pourquoi deux phases : solide et liquide ?
La fabrication de la LiFoFer se divise en deux phases distinctes : une phase solide et une phase liquide. Ces deux phases ont des usages complémentaires et des propriétés différentes.
1. La Phase Solide : Fermentation de Base
La phase solide de la LiFoFer constitue la première étape du processus. Elle est obtenue en mélangeant la litière forestière à des ingrédients comme le son de blé, la mélasse et le petit lait. Ce mélange est ensuite laissé à fermenter dans un récipient hermétique pendant environ un mois. Ce processus permet aux micro-organismes de se multiplier et de se concentrer dans le matériau solide.
Utilisation de la phase solide :
La phase solide peut être appliquée directement sur les sols comme un amendement organique. Elle améliore la structure du sol en augmentant sa capacité à retenir l’eau et en facilitant la décomposition des matières organiques. Cette étape est particulièrement utile pour :
- Améliorer la santé des sols en apportant des micro-organismes bénéfiques.
- Renforcer la croissance des plantes grâce à une meilleure disponibilité des nutriments.
- Contrôler les agents pathogènes présents dans le sol, ce qui réduit la nécessité de recourir aux pesticides chimiques.
La phase solide est efficace pour des interventions localisées, comme sur des petites parcelles ou dans des zones nécessitant un apport important de matière organique.
2. La Phase Liquide : Activation et Application Pratique
La phase liquide est une version activée de la phase solide. Elle est fabriquée en mélangeant la phase solide avec de l’eau, du sucre (ou de la mélasse) et du petit lait, puis en laissant fermenter ce mélange pendant une semaine. Cette étape d’activation permet une reproduction rapide des micro-organismes, rendant la solution liquide plus concentrée et plus facile à appliquer.
Utilisation de la phase liquide :
La phase liquide est particulièrement adaptée pour être utilisée dans :
- La pulvérisation foliaire : En diluant la phase liquide, on peut la pulvériser directement sur les feuilles des plantes. Cela aide à stimuler la croissance des plantes et à protéger contre certains bioagresseurs, comme les champignons et les bactéries.
- L’épandage sur les sols : Elle peut également être appliquée directement sur le sol, à grande échelle, de manière homogène et régulière. Cette méthode est idéale pour renforcer la structure des sols et augmenter leur résilience face aux conditions climatiques extrêmes, comme la sécheresse.
L’avantage principal de la phase liquide est sa facilité d’application, surtout sur de grandes surfaces. De plus, elle permet de multiplier le volume utilisable de la LiFoFer. À partir de 60 kg de phase solide, il est possible de produire entre 1200 et 2000 litres de phase liquide, ce qui en fait une solution économique pour les agriculteurs.
Différences principales entre les phases solide et liquide :
Phase Solide | Phase Liquide |
---|---|
Base du processus : Phase initiale de fermentation, utilisée pour fabriquer la phase liquide. | Activée : Contient une plus grande quantité de micro-organismes, plus facile à utiliser et à appliquer. |
Utilisation : Amendement organique appliqué directement au sol, améliore la structure et la fertilité. | Utilisation : Pulvérisation foliaire ou épandage, plus appropriée pour les applications à grande échelle. |
Durée de conservation : Peut être conservée jusqu'à deux ans si bien stockée en conditions anaérobies. | Durée de conservation : Doit être utilisée dans les 2 à 3 semaines pour une efficacité optimale. |
Praticité : Utilisation plus restreinte, adaptée aux sols et petites surfaces. | Praticité : Très adaptée pour des applications fréquentes et sur de grandes surfaces. |
Les étapes de fabrication de la LiFoFer
Voici la recette du LiFoFer :
1. Collecte de la litière forestière
La première étape consiste à collecter environ 4 kg de litière forestière dans un environnement naturel non perturbé par l’homme, comme sous des arbres anciens. Cette litière contient une diversité de micro-organismes qui seront activés lors de la fermentation.
2. Préparation du mélange
La litière forestière est mélangée à 4 kg de son de blé, 1 litres de petit lait, et 1 litres de mélasse. Le mélange est ensuite humidifié avec de l’eau non chlorée, de manière à ce qu’il soit légèrement humide sans être détrempé.
3. Fermentation de la phase solide
Le mélange est placé dans un récipient hermétique et laissé à fermenter pendant environ 30 jours à une température de 25 à 30°C. Il est important que le processus se déroule sans oxygène (anaérobie) pour favoriser le développement des bactéries lactiques.
4. Activation pour la phase liquide
Une fois la phase solide prête, elle peut être utilisée directement ou activée pour produire la phase liquide. Cela se fait en diluant la phase solide avec de l’eau, du petit lait et du sucre, puis en laissant fermenter ce mélange pendant une semaine. Cette phase liquide est ensuite prête à être appliquée sur les sols ou les cultures.
Avantages écologiques de la LiFoFer
L’utilisation de la LiFoFer présente plusieurs avantages environnementaux qui en font une solution durable pour les agriculteurs :
- Réduction des intrants chimiques : En stimulant la santé des sols et des plantes, la LiFoFer permet de réduire l’usage des engrais et pesticides chimiques, contribuant ainsi à une agriculture plus respectueuse de l’environnement.
- Valorisation des sous-produits agricoles : La fabrication de la LiFoFer repose sur l’utilisation de sous-produits souvent considérés comme des déchets, ce qui permet une meilleure gestion des ressources.
- Amélioration de la résilience des sols : En améliorant la capacité des sols à retenir l’eau et en renforçant leur structure, la LiFoFer aide les sols à mieux résister aux sécheresses et aux fortes pluies, rendant les cultures plus résistantes.
- Renforcement de la biodiversité microbienne : En réintroduisant une diversité de micro-organismes bénéfiques dans le sol, la LiFoFer contribue à restaurer les écosystèmes agricoles.
Conclusion
La LiFoFer, avec ses deux phases complémentaires, est un biofertilisant naturel qui offre de nombreux bénéfices pour les agriculteurs souhaitant adopter des pratiques agroécologiques. Facile à fabriquer, peu coûteuse et très efficace, elle permet d’améliorer la qualité des sols, la santé des cultures et de réduire l’impact environnemental des pratiques agricoles. Alors que l’agriculture est de plus en plus confrontée à des défis liés aux changements climatiques et à la dégradation des sols, la LiFoFer apparaît comme une solution prometteuse pour un avenir plus durable.
Le LiFoFer (Litière Forestière Fermentée) n’a pas de créateur unique, mais est dérivé des méthodes agroécologiques utilisant les micro-organismes efficaces (EM). Ces techniques ont été développées dans les années 1980 par le professeur Teruo Higa au Japon. Il a élaboré un mélange de micro-organismes provenant de fermentations et de compost, qui a rapidement été adopté en Asie du Sud-Est et en Amérique latine.
Bien que le LiFoFer solide et le Bokashi partagent certaines similitudes dans leur utilisation de la fermentation anaérobie et leur capacité à enrichir le sol en micro-organismes, ils diffèrent dans leur composition, leur origine et leurs objectifs principaux. Le Bokashi est plus axé sur le compostage rapide des déchets organiques, tandis que le LiFoFer est un biofertilisant qui repose sur l’utilisation de la biodiversité forestière pour améliorer la santé des sols et des cultures.